« Je ne m’y attendais pas, je suis très heureuse. Les prix, ça booste encore plus ! », se réjouit Rayane Dibsy, récompensée par le prix Jeune chercheur.e 2025 pour ses travaux de thèse relatifs à l’action du VIH sur le cytosquelette d’actine. Un prix qui lui a été remis lors de la Convention Sidaction 2025 par Françoise Barré-Sinoussi, prix Nobel de médecine 2008 et présidente de Sidaction.
Originaire de Saida (Liban), Rayane Dibsy a débuté ses études à l’université libanaise de Beyrouth, première université publique du pays. Passionnée de biologie, étudiante brillante, elle est première de sa promotion, et sait d’emblée qu’elle veut se consacrer à la recherche. Mais au Liban, les bourses de thèse sont accordées en priorité aux étudiants de nationalité libanaise. Or si sa mère est libanaise, Rayane a la nationalité de son père : celle d’une réfugiée palestinienne sous mandat libanais.
Malgré ses notes excellentes, ses chances sont maigres d’obtenir une bourse. L’un de ses professeurs lui conseille de poursuivre ses études à l’étranger. Un projet que Rayane, soucieuse d’élargir son horizon scientifique, avait déjà en tête. Ce sera la France, dont elle a appris la langue dès l’école primaire. Plus précisément Montpellier, dont l’université propose un master infectiologie et immunologie, deux disciplines qui la passionnent.
« C’était la première fois que je quittais la maison, que je prenais l’avion. J’avais 20 ans, et je ne connaissais personne en France. Mais j‘étais très motivée par cette expérience scientifique et personnelle. Et j’ai adoré Montpellier, où j’ai retrouvé la Méditerranée, le soleil, la plage ! ».
A l’interface entre cellule et virus
Une fois son master achevé, là aussi première de sa promotion, Rayane débute sa thèse à l’Institut de recherche en infectiologie de Montpellier (IRIM), dans l’équipe « Domaines membranaires et assemblage virale » codirigée par Delphine Muriaux et Cyril Favard, où elle avait déjà effectué son stage de master 2. « L’équipe travaille sur l’interface entre la cellule et le VIH, sur la manière dont le virus utilise le cytosquelette d’actine pour sortir de la cellule », explique la jeune chercheuse.
Publié en 2023 dans une revue prestigieuse, Nature Communications, son travail montre que le VIH, via sa protéine Gag, interagit avec une protéine cellulaire, « Arpin », qui ‘déramifie’ le cytosquelette d’actine, permettant ainsi au VIH de sortir du lymphocyte. Dernière étape du cycle du VIH, la sortie du virus est aussi la moins connue. L’étude ce cette étape, notamment grâce aux travaux de Rayane Dibsy, pourrait bien révéler de nouvelles cibles thérapeutiques.
la biologie cellulaire pour mieux cerner le VIH
Une fois sa thèse soutenue, en mars 2023, Rayane Dibsy déménage à Paris pour y mener un postdoctorat à l’Institut Pasteur. Dans le laboratoire d’Arnaud Echard (« Membranes, cytosquelette et division cellulaire »), elle étudie désormais le rôle du protéasome (machinerie cellulaire chargée de dégrader les protéines) au cours de la division cellulaire. Elle s’intéresse en particulier à l’étape de cytokinèse qui permet à une cellule-mère de se scinder en deux cellules-filles et qui fait également appel au cytosquelette dans ces étapes impliquant des modifications de courbures des membranes.
« C’est vrai que ce n’est plus large que le VIH, mais c’est un choix volontaire. Je souhaite ensuite revenir à l’étude de ce virus, plus particulièrement à ses relations avec la cellule. Ce ‘postdoc’ m’apporte de nouvelles connaissances sur la biologie cellulaire. Je souhaite observer la cellule dans ses conditions normales, afin, plus tard, de mieux comprendre comment elle réagit quand elle est infectée », explique Rayane Dibsy. Et après le postdoc ? « Il s’achève en 2027, et je sais que je veux rester en Europe. Mon but est de continuer dans la recherche académique, et d’ouvrir mon propre laboratoire ». 🟥