vih Vieillir avec le VIH : bâtir collectivement des solutions

04.07.25
Maëlle Boudet
6 min
Visuel Vieillir avec le VIH : bâtir collectivement des solutions

Les 19 et 20 juin derniers, Sidaction organisait à Paris un nouvel atelier consacré au vieillissement avec le VIH. Ces deux journées de travail réunissaient chercheurs, associatifs, soignants et personnes concernées autour d’une ambition : actualiser les recommandations portées depuis 2018 par Sidaction, et réfléchir à leur mise en œuvre concrète.

Grâce aux traitements, les personnes vivant avec le VIH vieillissent. Aujourd’hui, plus d’une sur deux a dépassé les 50 ans selon les données 2021 de l’Assurance maladie. Mais cette avancée soulève de nouveaux enjeux. Polypathologies, isolement, précarité, discriminations persistantes, parcours de vie complexes, poids du secret, représentations sociales négatives…

Depuis 2018, le groupe « Bien vieillir » travaille à documenter ces réalités et à formuler des recommandations concrètes. Un premier document de positionnement a été diffusé aux pouvoirs publics en 2023. L’atelier de juin avait pour double objectif d’en actualiser le contenu, et de prioriser les leviers d’action les plus urgents.

Des profils hétérogènes, encore trop peu documentés

Les discussions de l’atelier ont d’abord permis de partager des constats parfois anciens, mais toujours d’actualité. Une certitude émerge cependant des échanges : les personnes vivant avec le VIH (PVVIH) ne forment pas un bloc homogène.

Les situations sociales, les trajectoires de soin, les histoires de vie et les fragilités varient fortement. Pourtant, les données disponibles restent souvent limitées, en particulier pour les plus de 50 ans. L’étude MoiPatient, l’étude pilote des ActupienNEs, les États Généraux des PVVIH de 2024 et la future enquête VESPA 3 apportent ou apporteront des éclairages nécessaires mais qui doivent encore être complétés. « Il y a encore des manques, mais on a quand même pas mal de données maintenant » précise pendant l’atelier, Corinne Le Huitouze, référente Vieillir avec le VIH au sein de Sidaction, en indiquant que « l’âge moyen de décès de personnes vivant avec le VIH reste encore très jeune ».

L’un des enjeux identifiés pendant l’atelier est de favoriser des études qualitatives plus fines, pour mieux croiser les vécus et comprendre les besoins spécifiques liés à l’âge, au VIH, à la précarité ou à l’isolement.

Quatre groupes, quatre thèmes, un objectif commun

Le cœur de l’atelier s’est joué en petits groupes de travail où chacun apportait ses idées et des réflexions. Répartis en groupes de six à huit personnes, les participants ont pris le temps : « On décortique chaque thème », souligne Corinne Le Huitouze. Objectif : identifier les bonnes pratiques existantes, proposer des actions concrètes, et imaginer comment convaincre les pouvoirs publics.

Quatre axes ont été explorés :

  • La place des PVVIH dans les CORESS (Coordination régionales de la santé sexuelle) :  le groupe concerné indique que « la première chose, ce serait une commission PVVIH dans chaque CORESS ». Une commission en capacité de coordonner les parcours santé, thérapeutique et sociales des PVVIH.
  • Les interventions non médicamenteuses (ex. : activité physique adaptée) pour lesquelles le groupe impliqué souligne le besoin de « faire des expérimentations ‘montrables’, concluantes sur le terrain, pour convaincre les pouvoirs publics de faire évoluer les choses ».
  • Les droits économiques et sociaux des personnes vieillissantes, pour lequel le groupe en charge s’est concentré sur la mise en place d’un dispositif de centralisation des démarches administratives et des informations avec un accueil physique dans chaque département pour lutter contre la dématérialisation généralisée. Au-delà des aspects administratifs, une participante a pointé le fait qu’ « il y a une génération de médecins aujourd’hui qui n’est plus dans cette démarche de dialoguer, d’expliquer. Il n’y a plus ce travail d’équipe où le patient est impliqué ».
  • La lutte contre les discriminations, notamment la sérophobie et l’âgisme. Un participant du quatrième groupe reconnaît que « faire de la formation c’est important. Mais si on fait de la formation plate qui n’interroge pas les gens dans leurs pratiques, c’est un coup d’épée dans l’eau ».

« Souvent, dans le groupe Bien vieillir , on voit que certains ont déjà mis en place des choses, font des choses, et on peut s’en inspirer », a rappelé Corinne Le Huitouze. Le groupe ne cherche pas à réinventer à chaque fois : il capitalise, croise, documente. C’est ce qui en fait la force.

Expériences locales et pistes d’action

La matinée du 20 juin a permis une restitution collective des réflexions en ateliers et une discussion avec les participants des autres groupes. Les échanges ont permis de mettre en lumière des pistes concrètes, souvent inspirées d’initiatives locales déjà en place.

Parmi les idées citées :

  • Capitaliser les actions existantes dont l’efficacité a été prouvée et expérimenter les recommandations sur un territoire volontaire, pour obtenir plus de données probantes.
  • Renforcer les liens entre CORESS et acteurs associatifs par la création d’une commission PVVIH pour travailler ensemble avec des intervenants déjà informés, et favoriser le débat d’idées. « L’important, c’est que les gens sachent que les CORESS existent et qu’ils nous y rejoignent », précise l’un des intervenants de la restitution des propositions.
  • Redonner une place à un vrai accueil physique : « Avant, on avait des interlocuteurs pour traiter les dossiers », mais la crise du Covid a tout bousculé. « On parle ‘d’aller vers’, et bien venez faire des permanences dans les associations ! L’accueil public n’existe plus, lorsqu’il y a accueil, on renvoie souvent les patients vers quelqu’un d’autre, vers la page internet… »
  • Prendre en compte la santé mentale comme un axe prioritaire, car « la discrimination existe encore aujourd’hui, malgré les progrès médicaux ».
  • Valoriser les bénéfices d’interventions non médicamenteuses (yoga, respiration, activité physique adaptée), déjà recommandées par la HAS (Haute Autorité de Santé) mais également par l’INSERM (Institut national de la santé et de la recherche médicale).

Un travail de fond, qui continue

Les deux journées n’avaient pas vocation à produire un « livrable » immédiat, mais plutôt à structurer la suite du travail, d’en dessiner les perspectives. Il s’agit désormais de reformuler le document de positionnement, en tenant compte des priorisations, des nuances, des retours de terrain. Et surtout, d’en faire un outil utile pour les plaidoyers à venir.

« La magie de ce groupe, c’est qu’il permet les échanges, et de retourner sur son territoire avec des nouvelles infos et expériences », rappelle Corinne Le Huitouze. « Ce groupe connaît bien les besoins des personnes vivant avec le VIH, mais aussi ceux des acteurs de terrain. Il faut qu’on fasse entendre ce savoir ». Ce n’est pas rien, à l’heure où vieillir reste encore trop souvent synonyme d’invisibilité.

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