vih Agence ANRS | Maladies infectieuses émergentes : quel bilan, un an après sa création ?

04.03.22
Kheira Bettayeb
7 min
Visuel Agence ANRS | Maladies infectieuses émergentes : quel bilan, un an après sa création ?

Un an après sa création, quelles actions fortes ont été menées par l’agence ANRS | Maladies infectieuses émergentes dans le domaine de la lutte anti-VIH ? A-t-elle porté ce combat avec autant de dynamisme que l’ex-ANRS ? Ou au contraire, a-t-elle marqué le pas, au profit de la recherche sur d’autres maladies infectieuses ? Éléments de réponses.

« Notre agence a pris efficacement le relais de l’ex Agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites virales (ANRS, Ndlr) au niveau de ses missions historiques, notamment celles touchant au VIH. En parallèle, elle a rempli avec succès ses nouvelles fonctions relatives aux maladies infectieuses émergentes, dont la Covid-19. Certes, il est toujours possible de mieux faire. Mais de mon point de vue, cette première année s’est bien passée. Il nous faut désormais continuer ainsi » : voici le bilan dressé pour 2021, par le Pr Yazdan Yazdanpanah, directeur de l’Agence de recherche sur le sida et les hépatites virales | Maladies infectieuses émergentes (ANRS | Maladies infectieuses émergentes).

Opérationnelle depuis le 1er janvier 2021, cette nouvelle structure est née de la fusion de l’ANRS, qui a piloté la recherche anti-VIH française pendant 32 ans, et du consortium d’équipes et de laboratoires multidisciplinaire REACTing, créé en 2013 pourcoordonner la recherche en période de crises sanitaires liées aux maladies infectieuses émergentes(Ebola, Zika, Covid-19, etc.). Ses missions sont de fédérer, coordonner, animer et financer la recherche publique sur différents types de maladies infectieuses : le VIH et les hépatites virales, cœurs de cible de l’action de l’ex-ANRS depuis sa création en 1988 ; les infections sexuellement transmissibles (IST) et la tuberculose, intégrées aux missions de l’ex-ANRS en 2020 ; et, grande nouveauté, les maladies infectieuses émergentes, ajoutées à la liste en 2021, dans le but de renforcer la recherche biomédicale sur ces infections et mieux armer scientifiquement la réponse à l’épidémie de Covid-19.

Concernant les actions menées en 2021 dans le champ du VIH même, « nous avons continué plusieurs projets importants démarrés par l’ex-ANRS », souligne le Pr Yazdanpanah. Parmi ces recherches : notamment le projet ANRS 170 QUATUOR, destiné à évaluer l’efficacité et la tolérance de la prise du traitement anti-VIH quatre jours par semaine au lieu de tous les jours. Visant à – entre autres – réduire les effets indésirables liés aux traitements anti-rétroviraux, cette approche s’est avérée non inférieure au traitement 7 jours sur 7, lors de travaux publiés tout récemment [i].

De nouveaux projets en cours

« Nous en avons également débuté plusieurs nouveaux projets touchant au VIH », continue le directeur de l’ANRS| Maladies infectieuses émergentes. Et de citer l’essai clinique lancé en février 2021 avec le Vaccine Research Institute de Créteil (VRI), pour tester un candidat vaccin préventif contre l’infection par le VIH : le produit « CD40.HIVRI.Env », qui repose sur l’injection d’anticorps monoclonaux [ii] ciblant spécifiquement des cellules clés de la réponse immunitaire, les cellules dendritiques.

Enfin, « lors de sa première année d’existence, notre agence a accepté de financer plusieurs autres nouveaux projets concernant le VIH, qui devraient être lancés dans les prochains mois », poursuit Yazdan Yazdanpanah. Une recherche phare ici vise à évaluer l’acceptabilité et la capacité à prendre correctement un traitement de prophylaxie pré-exposition (PrEP) [iii], destiné à réduire le risque de transmission du VIH-1 par voie sexuelle, et approuvé en fin décembre 2021 par l’agence du médicament américaine : le cabotegravir injectable à action prolongée, administrable en intramusculaire tous les deux mois. « Une partie de ce projet sera mené en France et l’autre, en Afrique de l’Ouest », précise le Pr Yazdanpanah.

Côté budget maintenant, « celui dédié au VIH, aux hépatites et à la tuberculose n’a pas du tout changé : il est resté de 40 millions d’euros environ, comme du temps de l’ANRS. Dès le début, nous nous sommes engagés en ce sens. Nous nous y sommes tenus », se félicite le directeur de l’ANRS | Maladies infectieuses émergentes.

Une enveloppe constante pour le VIH

Pour financer les projets portant sur les nouvelles missions de l’agence (maladies infectieuses émergentes), « nous avons demandé et obtenu un budget dédié constitué de 80 millions d’euros de dotation sur 5 ans, provenant du dispositif PEPR (Appel à programmes et équipements prioritaires de recherche exploratoires) « maladies infectieuses émergentes », et 10 millions d’euros annuels du Programme de recherche clinique (PHRC). Cependant, nous devons continuer, notamment pour pérenniser 10 millions d’euros de subvention d’État par an pour la recherche sur les émergences dans le sud », poursuit Yazdan Yazdanpanah.

« Nous sommes ravis que l’enveloppe destinée à la recherche sur le VIH, les hépatites et les IST soit restée constante », se réjouit Mélanie Jaudon, coordinatrice du collectif associatif TRT-5 CHV (2), qui défend les intérêts des personnes vivant avec le VIH et/ou des hépatites virales. « Nous sommes rassurés de l’obtention d’un budget dédié aux maladies infectieuses émergentes. Ceci dit, ce budget n’est pas pérenne. Aussi, dans le futur, nous ferons attention à ce que l’enveloppe dédiée au VIH, aux hépatites et aux IST continue à rester intacte ».

Selon la représentante du TRT-5 CHV, une autre réalité inquiète : « le fait que la Covid ait détourné de nombreux chercheurs travaillant initialement sur le VIH, les hépatites et les IST, de la recherche sur ces maladies, au profit de celle sur les maladies infectieuses émergentes ». En effet, « comme les chercheurs ont été et sont encore mobilisés par la recherche sur la Covid, des projets portant sur le VIH ont été reportés ou ralentis, et nous avons enregistré moins de projets sur le VIH déposés à nos appels d’offres », constate le Pr Yazdanpanah.

« Nous comptons sur la nouvelle agence pour rendre la recherche anti-VIH, IST et hépatites à nouveau attractive et remobiliser les chercheurs, notamment les plus jeunes, sur ces thématiques », commente Mélanie Jaudon.

Pour le Pr Yazdanpanah, afin que la recherche sur le VIH reprenne de plus belle, il faudra aussi faire attention à son animation : « il est crucial de permettre des échanges entre des chercheurs de différentes institutions et de différentes spécialités : cela favorise des collaborations, et aide à la réflexion, à la conception et au lancement de projets innovants. Or depuis deux ans, du fait des restrictions imposées par l’épidémie de Covid, les chercheurs ne sont plus allés à des congrès. Tout se fait par visioconférence…Il nous faut donc trouver un juste milieu entre le tout présentiel et le tout virtuel. Ce à quoi nous réfléchissons… »

Les priorités d’avenir de la nouvelle agence concernant la recherche sur le VIH ? « Nous nous concentrons sur les projets visant à améliorer la prévention, le dépistage, l’accès aux soins et la guérison (Cure) et le vieillissement des patients VIH », répond le Pr Yazdanpanah. Ces priorités devraient être plus amplement décrites lors des premières Journées scientifiques de l’ANRS| Maladies infectieuses émergentes, prévues les 15 et 16 mars 2022.

Références

[i] R. Landman et al. The Lancet HIV. 2 févier 2022 : https://doi.org/10.1016/S2352-3018(21)00300-3.

[ii] Protéines immunitaires fabriquées en laboratoire à partir d’un clone de cellule immunitaire.

[iii] La PrEP est un outil préventif qui permet à une personne séronégative exposée au VIH de se protéger en prenant un traitement antirétroviral.

[iv] « TRT » pour « Traitements et Recherche Thérapeutique » ; « 5 » pour le nombre d’associations membres de lutte contre le sida à sa création (désormais au nombre de 19) ; et « CHV » : pour Collectif hépatites virales, qui a fusionné avec le TRT-5 en fin 2019. 

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