vih En Afrique, une mortalité infantile accrue malgré les traitements

01.09.22
Romain Loury
5 min

Même lorsqu’ils sont rapidement mis sous traitement, les enfants nés avec le VIH demeurent à risque accru de mortalité au cours de leurs premières années de vie, selon des travaux menés en Afrique, présentés lors de la 24ème Conférence internationale sur le sida (AIDS 2022).

Alors que 76% des adultes vivant avec le VIH sont sous traitement à travers le monde, seuls 52% des 1,7 million d’enfants sont traités, voire seulement 35% en Afrique de l’ouest et du centre. Un retard d’autant plus inquiétant que la mortalité infantile, indépendamment du VIH/sida, est déjà très élevée en Afrique subsaharienne.

Même lorsqu’ils sont rapidement mis sous traitement, la situation est souvent critique pour les enfants vivant avec le VIH, comme le montre l’étude présentée par Camille Bréhin, pédiatre au CHU de Toulouse, portant sur 212 enfants inclus dans la cohorte EARTH-EPIICAL [i]. Suivis jusqu’à l’âge de 4 ans, ces enfants, originaires du Mali, du Mozambique ou d’Afrique du Sud, ont été mis sous traitement avant l’âge de trois mois. Vingt-trois d’entre eux sont décédés au cours du suivi, dont 74% au cours de leurs six premiers mois de vie, et 52% des suites d’un évènement classant sida.

Les résultats montrent que les jeunes enfants vivant avec le VIH présentent un surrisque de mortalité d’environ +7% par rapport à l’ensemble des enfants de leur âge, dont +5,7% suite à un évènement classant sida et +1,4% pour d’autres raisons. « Malgré un traitement précoce, l’excès de mortalité, liée ou non au sida, demeure élevée chez les enfants d’Afrique subsaharienne vivant avec le VIH », commente Camille Bréhin. Parmi les facteurs de mortalité les plus marqués, une charge virale élevée lors de la mise sous traitement, ainsi qu’un faible pourcentage de CD4.

Mettre fin à la transmission maternelle

Au-delà de l’accès universel au traitement des enfants vivant avec le VIH, d’une meilleure disponibilité de formulations pédiatriques, il est crucial d’agir plus résolument en matière de prévention de la transmission maternelle. Tels sont les objectifs d’un nouveau partenariat annoncé à Montréal, la Global Alliance to End AIDS in Children, lancé par trois agences onusiennes (Unicef, Onusida, OMS), avec le soutien technique du Fonds mondial de lutte contre le VIH/sida, la tuberculose et le paludisme et du programme américain Pepfar [ii].

Visant à mettre fin à l’épidémie de VIH/sida chez les enfants d’ici à 2030, cette initiative met l’accent sur le dépistage et le traitement précoce des enfants nés avec le VIH, ainsi que sur le dépistage et l’accès universel au traitement chez les femmes enceintes et allaitantes. Au niveau mondial, 81% des femmes enceintes vivant avec le VIH ont été traitées au cours de leur grossesse en 2021, rappelle l’Onusida. Certes, les progrès sont notables depuis 2010, lorsque seules 46% d’entre elles étaient sous traitement. « Fin 2021, 12 pays d’Afrique subsaharienne avaient atteint la cible de 95% de femmes enceintes traitées, et le Botswana est devenu le premier pays africain à haute prévalence en voie d’éliminer la transmission verticale du VIH », note l’Onusida.

Malgré les avancées, ce succès demeure mitigé : la couverture antirétrovirale n’a pas réellement progressé depuis 2015, année durant laquelle elle atteignait déjà 81%. « Nous sommes loin d’avoir mis fin aux nouvelles infections chez l’enfant, et la situation stagne dans plusieurs pays fortement touchés par le VIH/sida (…) La pandémie de Covid-19 nous a éloignés du but : entre 2019 et 2021, la couverture antirétrovirale chez les femmes enceintes et allaitantes a décliné dans certains pays », ajoute l’Onusida.

Au Canada, un rebond de la transmission maternelle

Ce recul dans la prise en charge des femmes enceintes ne s’est pas restreint aux pays du Sud, comme le révèle l’étude présentée par Laura Sauve, du Women’s Hospital and Health Centre de Vancouver [iii]. Menée sur 22 centres canadiens de prise en charge du VIH, elle révèle qu’entre mai et décembre 2020, cinq enfants sont nés infectés, pour 155 femmes ayant accouché au cours de ces huit mois, durant lesquels la crise Covid-19 faisait rage. Soit un taux de transmission de 3,2%, contre 1,4% pour l’ensemble de la période 2015-2019 et 1% en 2021.

Raison probable de ce phénomène, un traitement suboptimal au cours de la grossesse, découlant de difficultés de suivi des patientes : 7,6% des mères ayant accouché entre mai et décembre 2020 avaient pris un régime inadapté à la prévention de la transmission périnatale, contre 6 ,7% sur la période 2015-2021. Cette tendance était particulièrement marquée dans les populations les plus vulnérables, en particulier chez les femmes contaminées par injection de drogues : parmi elles, 26,1% étaient sous traitement suboptimal durant leur grossesse en mai-décembre 2020, contre 13,6% sur 2015-2019.

Notes

[i] « Probability of AIDS and non-AIDS-related mortality of early-treated children living with HIV-1 », Camille Bréhin, vendredi 29/07

[ii] « Launch of the Global Alliance Initiative to end AIDS in children by 2030: Building partnerships, communities and innovation », session satellite, lundi 01/08

[iii] « The effect of the COVID-19 pandemic on access to HIV Treatment and vertical transmission: results from the Canadian Perinatal HIV Surveillance Program », Laura Sauve, vendredi 29/07

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