vih Le cas Esperanza : peut-on vraiment parler de guérison du VIH ?

18.11.21
Nora Yahia
4 min
Visuel Le cas
Esperanza : peut-on vraiment parler de guérison du VIH ?

Depuis deux jours, la presse se fait écho d’un nouveau cas de « guérison spontanée du VIH ». Qui est cette patiente argentine, surnommée Esperanza, qui aurait pu se débarrasser du virus sans l’aide de traitement ? Peut-on réellement parler de guérison ? Transversal fait le point.

Des chercheurs américains du Ragon Institute, du MIT et d’Harvard ont annoncé avoir identifié un nouveau cas de « guérison du VIH ». La patiente en question ne présenterait aucune trace du virus dans son organisme. Qui est cette patiente ? Comment les chercheurs en sont arrivés à cette conclusion ?

Cette jeune femme de 30 ans, testée positive pour le VIH en 2013, a réussi à maintenir une charge virale indétectable sans prise de traitement. Au cours de ses années de suivi, ses sérologies VIH étaient en dessous du seuil de détection et elle ne présentait aucun signe clinique de maladies associées au VIH. Entre 2019 et 2020, elle a tout de même reçu un traitement antirétroviral de six mois, pour les deux derniers trimestres de sa grossesse. Après la naissance de son enfant (testé négatif au VIH), elle a arrêté le traitement et a continué depuis à maintenir une charge virale indétectable.

Les chercheurs ont mené une analyse virologique poussée, puisqu’ils ont passé au crible pas moins d’un milliard de cellules immunitaires sanguines et plus de 500 millions de cellules placentaires (congelés après l’accouchement). Différentes techniques de pointe ont été utilisées pour rechercher la présence d’ARN viral (synonyme de la présence de virus actifs) et de provirus intacts (synonyme de réservoirs compétant capable de produire à nouveau des virus quand il est réactivé). Ils ont détecté sept provirus défectueux, donc incapables de produire de nouveaux virus viables si réactivés. Cependant, aucune trace d’ARN viral ou de provirus intact n’a été détectée.

Ce cas vient s’ajouter au cas du patient de San Francisco, également identifié par la même équipe de recherche, et chez qui aucune trace de provirus intact n’avait été détecté. Mais peut-on réellement parler de guérison ou de « cure stérilisante » pour ces deux cas ? Il faut rester prudent avec les termes utilisés et la signification que l’on veut leur donner. Le réservoir viral du VIH est très pernicieux, il sait très bien se cacher dans tout l’organisme et se rendre inaccessible. Les auteurs eux-mêmes, tempèrent la portée de leur résultat, en indiquant que « L’absence de preuve de provirus VIH-1 intacts dans un grand nombre de cellules n’est pas une preuve d’absence de provirus VIH-1 intacts. Une cure stérilisante du VIH-1 ne peut jamais être prouvée empiriquement. »

Une des limitations de cette étude, est qu’il n’y a pas eu de recherche de présence du virus dans des biopsies d’organes qui peuvent cacher les cellules réservoirs (ex : ganglions, intestins), comme cela a été fait pour les patients de Berlin et de Londres. La question a été posée au Dr Asier Saez-Cirion, directeur de recherche à l’Institut Pasteur et expert des questions « Cure ». Selon lui, cela pourrait s’expliquer par la difficulté d’obtenir ces biopsies, puisque celles-ci ne sont pas autorisées ou extrêmement compliquées à obtenir dans des nombreux pays (par exemple quasiment impossible en France). En revanche, le placenta étant considéré comme un « déchet médical », il est plus facile d’y avoir accès.

Pour en revenir à la guérison, malgré les technologies de pointe, aujourd’hui, il est impossible de prouver l’éradication totale des réservoirs de l’organisme. Le terme guérison doit alors être utilisé avec la plus grande précaution. Que ce soient les personnes contrôleurs d’élite, les contrôleurs post-traitement, ou les Pv VIH ayant reçu une greffe de moelle osseuse, il existe une pluralité de profil de personnes chez qui le virus n’est plus détecté. Mais ce qui est vrai à un temps donné peut changer et il arrive parfois chez certaines de ces personnes, que le virus que l’on croyait éliminé, revienne à la charge.

Au-delà des effets d’annonce qui peuvent se faire dans la presse grand public, la découverte de ce cas Esperanza donne quand même espoir aux chercheurs de comprendre quels mécanismes immunitaires, en place chez cette jeune femme, permettent de contrôler efficacement le virus sans prise de traitement, jusqu’à le rendre invisible.

Pexels
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